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En plus de trouver une nourriture saine et suffisante, les détenus font souvent face à des maladies dont la prise en charge pose un sérieux problème. Quelles sont donc ces maladies qui sévissent dans la prison de Bukavu ? Quelles en sont les causes, comment y apporter des solutions et qui en est responsable ? Nous avons passé quelques semaines à suivre la vie des détenus pour essayer de comprendre ce qui se cache derrière ces longs murs infranchissables.

En moyenne quatre mille deux cents détenus malades sont consultés chaque année dans la prison centrale de Bukavu. Les maladies les plus récurrentes sont notamment les infections respiratoires aigües, le paludisme, la hernie, les hémorroïdes, la Tuberculose, le kibouchi et toutes sortes d’autres infections et pathologies.

Un médecin au centre hospitalier pénitentiaire de la prison centrale de Bukavu, qui a requis l’anonymat, indique que la plus dangereuse de toutes ces maladies qui sévissent dans cette prise est celle appelée « kibouchie », une maladie contagieuse et se manifeste au début par des butons surtout sur les organes génitaux. Une fois que le malade se gratte, ces boutons se transforment alors en plaie.
Notre source précise qu’elle consulte 15 à 20 détenus malades par jour.

Pour sa part, M.K, un des capitas du quartier qui abrite les malades, affirme que la prise en charge des détenus malades est chaotique faute des moyens et par manque des médicaments. M.K, un nom d’emprunt ayant requis l’anonymat, affirme que beaucoup de cas de maladies nécessitent des interventions chirurgicales comme par exemple la hernie, mais le centre hospitalier pénitentiaire n’a pas des moyens et équipements pour soigner ces cas. Il révèle que certains détenus meurent suite à l’inaccessibilité aux soins.

Approchés, certains détenus malades font savoir qu’ils tombent de fois malades suite aux mauvaises conditions carcérales et la violation de leurs droits. L’un d’eux O.P, un nom d’emprunt ayant requis l’anonymat renseigne qu’il est tombé malade après qu’il ait été obligé de dormir en station debout, sans soulier. Pire, il a soumis à la manipulation des matières fécales. Son témoignage se passe de tout commentaire.

Un autre prisonnier qui a requis l’anonymat souffre de la hernie depuis plusieurs mois dans cette maison carcérale mais n’a bénéficié d’aucun soin de santé.

Le personnel soignant au centre hospitalier pénitentiaire de la prison centrale de Bukavu, demande aux autorités tant nationales que provinciales d’augmenter le plateau médical et construire aussi un centre médical avec tous les matériels nécessaires pour une meilleure prise en charge des détenus.

Lors de la cérémonie de son installation comme directeur de la prison centrale de Bukavu le 11 janvier 2021, le nouveau directeur YUSUFU MALIKE JOSEPH a indiqué qu’il y a beaucoup de défis à relever dans cette maison carcérale entre autres les soins de santé de détenus.

Contacté à ce sujet, le ministre provincial de la justice Jospin BITAFWANWA qui a dans ses attributions la gestion des prisons au Sud-Kivu, renseigne que le gouvernement provincial intervient pour toutes les questions de la prison notamment celle de soins des détenus.
Justin BITAFWANWA appelle les responsables des différents services et le personnel soignant à la collaboration et les invite à alerter lorsqu’un détenu malade nécessite une intervention urgente car tout détenu a droit à la vie et aux soins de santé de qualité.

De son côté, le directeur national, chef de service pénitentiaire en RDC, un service du ministère de la justice, Alain MATAMBALA MUKULA affirme que les soins de santé des détenus relèvent de la responsabilité du ministère de santé publique. Il avoue que ce ministère ne joue pas correctement son rôle.

Alain MATAMBALA MUKULA souligne que même dans le budget national il y a une ligne prévue pour l’achat des médicaments pour toutes les prisons de la République.
La commission nationale de droits de l’homme – CNDH- ainsi que d’autres organisations des droits humains déplorent les conditions dans lesquelles vivent les détenus à la prison centrale de Bukavu.

Aux dernières nouvelles, juste au moment de boucler cette enquête, nous avons appris que trois détenus malades ont déjà perdu la vie de janvier à mars 2021 tandis que 45 autres sont décédés en 2019. Enquête menée avec l’accompagnement de l’organisation Inter news.

Sylvie Nabintu

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